Too late

« La beauté physique n’a rien à voir avec l’amour. Il ne naît pas de l’attirance qu’on ressent l’un pour l’autre. L’amour ne naît pas des rires qu’on partage. L’amour ne naît même pas de ce qu’on peut avoir en commun. De toute façon l’amour ne se définit pas plus qu’il ne se trouve, d’une manière ou d’une autre, dans le bonheur qu’il apporte. L’amour ne se trouve pas. Il vous trouve. »

Jamais Plus

« On se ressemble », a-t-il dit. Là, je l’ai regardé dans les yeux. « Toi et moi ? » « Non, les plantes et les humains. Les plantes ont besoin d’amour pour survivre. Les humains aussi. Dès la naissance, on a besoin de l’amour de nos parents pour survivre. S’ils nous accordent assez d’attention, on devient de meilleurs humains. Mais s’ils nous négligent… » Il s’est interrompu, l’air triste, s’est essuyé les mains sur ses genoux comme pour en ôter les dernières traces de terre. « S’ils nous négligent, on se retrouve S.D.F. et incapable d’accomplir aucune action valable. » Ses paroles m’ont mis le cœur à l’envers. Je ne savais pas quoi répondre. Était-ce ainsi qu’il se voyait ? Il allait se relever quand j’ai prononcé son nom. Du coup, il s’est rassis dans l’herbe et je lui ai désigné la rangée d’arbres qui longeaient la clôture gauche du jardin. « Tu vois le plus haut de tous ? » Au milieu se dressait un chêne qui dominait les autres. « Il a poussé tout seul. La plupart des plantes ont besoin de beaucoup de soins pour survivre. Mais d’autres, comme les arbres, sont assez fortes pour ne se fier qu’à elles-mêmes. » Je ne savais pas trop s’il comprenait où je voulais en venir, mais il devait comprendre qu’il était assez fort pour survivre à tout ce qui avait pu lui arriver dans l’existence. Je ne le connaissais pas bien, mais je voyais qu’il était résistant. Infiniment plus que je ne le serais sans doute à sa place. Il ne quittait plus l’arbre des yeux, au point de ne plus cligner des paupières. Quand, enfin, il les a remuées, ça n’a été que très légèrement, avant de se remettre à considérer la pelouse. À la façon dont sa bouche se tordait, j’ai cru qu’il allait faire la grimace, et puis non, il a souri légèrement. »